Pierre calcaire
h. 133 cm
1979
Dépôt de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Sculptée en 1979 lors du Symposium des Avins-en-Condroz, cette oeuvre a été installée au Musée en plein air en avril 1994.
Le souvenir permet de bien cerner la portée abstraite du travail d’André Willequet. Son point de départ est figuratif : un personnage encapuchonné dont la silhouette se distingue encore et qui n’est pas sans rappeler les pleurants du monument funéraire du duc de Bourgogne par Claus Slutter (1350-1406). Au travers de la démarche « abstractive » de l’artiste, l’image originale acquiert une portée autonome; « J’ai compris petit à petit que les formes ont une vie propre, indépendante de la chose représentée » déclare André Willequet à propos de l’évolution de sa pratique artistique dans la seconde moitié des années ’40. On peut d’ailleurs décrire sa sculpture de manière exclusivement formelle : succession dynamique de plans asymétriques, rythme dans la disposition des volumes, passages du clair à l’obscur, inflection de la lumière au gré des reliefs et des coups de ciseau … C’est sa volonté très lyrique de comprendre le matériau qui dicte au sculpteur le sens de ce travail. Le poids, le silence, la densité, la dureté, l’opacité qu’il éprouve face à la pierre sont autant de caractères renforcés par le traitement plastique.
Le choix du titre même de la sculpture traduit la qualité du processus d’abstraction. On y décèle l’idée d’une trace d’un passé – il s’agit d’un « souvenir » – qui pourrait être lointain comme l’histoire de la pierre, matériau issu d’une évolution lente aux mouvements imperceptibles.
André Willequet procède ici moins par stylisation que par synthèse; il traduit la quintessence d’une émotion. Le plein sens de l’oeuvre ne se dévoilera qu’à celui qui y prête suffisamment d’attention. Ainsi, Le souvenir réclame-t-il du regardeur une disponibilité accrue, une contemplation qui permet d’accéder non seulement à la charge sensible de l’oeuvre mais aussi à la valeur figurative qu’elle détient encore.
Pierre Henrion