Béton, bois, métal, plexiglas,
1996
Baliser d’intégrations plastiques les chemins qui relient les deux flancs de la vallée du Blanc Gravier s’impose comme un véritable défi. En effet, seuls les abords des sentiers peu propices à l’installation d’une sculpture sont encore utilisables. Répondant à cette difficulté comme à la nécessité d’emmener le visiteur à travers le domaine du Sart Tilman, Sieste sur les hauteurs de Liège propose un parcours où l’intervention de l’artiste a soumis sa forme à la flore autochtone.
L’itinéraire défini par Patrick Corillon est scandé en trois stations qui, renvoyant les unes aux autres, stimulent la promenade. A chaque arrêt, l’artiste a installé le moulage en béton d’une souche d’arbre. Il s’agit de reconstitutions du pied des arbres contre lesquels Oskar Serti aurait, en 1919, fait des siestes. Les textes des écriteaux qui, placés à côté des sculptures, donnent des précisions, racontent également que Serti y aurait tour à tour échappé à une attaque de fourmis, brisé le bras droit d’un Christ crucifié et détourné le pouvoir guérisseur d’un arbre à clous.
Comme toujours chez Corillon, le visiteur peut soit s’arrêter à l’anecdote du récit soit se laisser entraîner dans le labyrinthe de sens dégagé par le texte. A s’y laisser prendre, l’oeuvre produira un faisceau de liaisons qui mettent en relation le Musée en Plein Air avec d’autres lieux de culture – avec le Musée d’Art wallon qui abriterait un tableau de Pierre Lipart intitulé Siestes sur les hauteurs de Liège, avec l’église de Saint-Hubert riche des reliques d’un miracle d’apparition de crucifix ou avec le Musée de la Vie wallonne qui conserve un fort beau spécimen d’arbre à clous.
” Par ce projet, ajoute Corillon, je voudrais développer un sentiment que j’aime retrouver dans les parcs, à savoir, l’action conjuguée de l’homme sur la nature à celle de la nature sur l’homme “. Avec l’apparition des mousses végétales sur le béton, l’artifice des moulages perdra son poids pour laisser place à l’ambiguïté d’un projet mi-culturel, mi-naturel.
Pierre Henrion