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Album et bleu

48 dalles de lave émaillées sur un socle en béton
305 x 345 cm (chaque mur)
1985
Dépôt de la Fédération Wallonie-Bruxelles

Album et bleu se présente comme une double page largement ouverte, chaque panneau étant illustré de 24 pavés historiés. Le titre prolonge la métaphore du livre, qui nous renvoie à la formation même de l’artiste, et décrit les couleurs de l’oeuvre : blanc (album en latin) et bleu. L’emploi de ces couleurs traditionnelles résulte ici d’un choix plus que d’une contrainte technique, comme une allusion à la céramique populaire, aux pavés de Delft ou aux azulejos portugais. Les 48 images constituent un véritable répertoire des formes et des thèmes explorés par le peintre depuis plus de 50 ans : thèmes telluriques et végétaux développés en spirales serpentines, images naïves d’une Wallonie de légende (lion de Waterloo, gille de Binche). L’album n’est-il pas par excellence le modèle du livre pour enfants ?

Symétrique dans la disposition de ses deux “pages”, l’oeuvre se déploie aussi dans un jeu de miroirs très élaboré. Au Moyen Âge, le “miroir” (speculum) désignait une sorte d’encyclopédie reflétant le monde ou l’idéal même du lecteur. Comme dans une fable morale, l'”histoire” se termine d’ailleurs, en bas à droite, par le memento mori d’un crâne.

En s’ouvrant sur les fenêtres de la bibliothèque de la Faculté de Droit, l’Album fait image pour tous les livres, et l’étudiant qui y serait un instant distrait par les ensorcellantes icônes d’Alechinsky pourra même s’y voir lire…

Sur l’un des pavés, l’oeuvre est titrée et signée par deux fois – comme une double page qui répète la disposition des murs de béton : une fois lisible et une fois en “miroir”. Sur un autre, une vue d’atelier et sur le chevalet, un tableau dont le motif est répété ailleurs.

Vibrant tout entier des rimes plastiques qui se répondent ainsi d’un pavé à l’autre, Album et bleu invite le spectateur à enluminer sa propre histoire comme il illustre celle de l’artiste : album-souvenir, encyclopédie imaginaire, c’est aussi une oeuvre profondément spéculative.

Yves Randaxhe

Pierre Alechinsky

Bruxelles, 1927

Après ses études d’illustration et de typographie à l’Ecole nationale supérieure des Arts visuels (La Cambre, Bruxelles), Alechinsky devient rapidement l’un des acteurs les plus importants du monde artistique belge. Proche de la Jeune Peinture Belge, il fonde avec Olivier Strebelle les Ateliers du Marais (1949), où se croisent aussi Serge Vandercam, Jean Raine, Luc de Heusch…

C’est la même année qu’il rentre en contact avec Christian Dotremont et s’investit dans le mouvement Cobra, dont il reste aujourd’hui le principal continuateur spirituel (spontanéité technique, liberté d’expression face au débat figuration-abstraction, goût des arts populaires…).

Il s’initie encore à la gravure chez Hayter à Paris et surtout à la pratique de la calligraphie japonaise, à laquelle il consacre un film dès 1952. Installé à Bougival et à New York, Alechinsky est aussi un écrivain plein d’humour, proche de l’esprit surréaliste et caustique du Daily Bul (La Louvière). On lui doit de nombreuses oeuvres en collaboration, entre autres avec Walasse Ting, Appel et Dotremont; il a signé avec celui-ci une création en espace public, Sept écritures, pour le métro bruxellois (1976).

Yves Randaxhe