Sentier empierré, plantations, 4 colonnes, 2 dendroscopes
aux abords de l’Observatoire du Monde des Plantes
2003
Dendroscopes et colonnes s’inscrit dans un contexte particulier, celui d’un observatoire scientifique (…) du monde des plantes. C’est donc de l’interaction de ce contexte avec l’objet et l’ensemble des éléments qui la constituent qu’une lecture adéquate de l’oeuvre pourra être faite.
Daniel Dutrieux
A l’instar des autres installations de l’artiste au Musée en Plein Air du Sart-Tilman ou à Liège, le dispositif de Dendroscopes et colonnes est complexe. Mais mieux encore que celles-ci, l’oeuvre nouvelle s’accommode avec bonheur d’une découverte sur le mode de la promenade. Centrée sur l’Observatoire du Monde des Plantes, l’oeuvre est d’abord expérimentée sous la forme d’un sentier empierré, rouge, arc de cercle tendu entre un arbre existant et un hêtre pourpre à planter, reliant le parking à l’entrée du bâtiment. Il croise un autre arc de cercle planté d’arbres et démarrant presque au même point; tous deux se règlent en partie sur l'”axe régulateur du Sart-Tilman”, au long duquel sont disposés les quatre colonnes et les deux dendroscopes qui donnent leur titre à une oeuvre qui refuse pourtant d’être réduite à ces seuls artefacts.
Les quatre colonnes évoluent, d’un bout à l’autre de l’installation, simultanément en taille (55 cm, 1 m, 1,5 m, 2,55 m) et quant au nombre de leurs faces (4, 6, 8, 16 faces). Chacune est associée à une mode d’appréhension du monde végétal : elles fondent donc successivement le “socle du visuel”, le “socle des graines”, la “stèle des écorces” et la “stèle du temps”. Socle du visuel et stèle des écorces se complètent de dendroscopes, vastes panneaux de métal hauts d’1,85 m et percés de mires géométriques permettant, selon un ancien manuel d’élagage, de “donner une idée de la forme que doivent avoir les arbres forestiers bien élagués”. Trous de serrure à travers lesquels la nature rejoint l’artifice et les arbres, l’arbre idéal. Le premier de ces dispositifs vise pour nous quatre arbres à feuillage rouge; le second, dont les mires sont retournées, mettant le tronc au dessus des feuillage, attire notre regard sur huit arbres aux écorces remarquables; la colonnes comporte elle-même huit faces gravées des motifs des écorces en question.
Au centre géométrique de toute l’installation, le socle des graines se place dans l’axe de l’entrée du bâtiment, à la croisée de l’axe régulateur et du sentier du visiteur, au centre d’une ombre d’arbre verte dessinée au sol. Elle porte, gravés en creux dans la pierre, comme de précieux fossiles, la trace de plusieurs sortes de graines. Enfin, au point de rencontre de l’axe régulateur et de l’arc des plantations d’arbres, l’installation se termine par un promontoire surmonté d’une colonne à 16 côtés, la stèle du temps. Mesurant 2,55 m, elle est parcourue d’une ligné gravée en spirale ascendante menant, sur la tablette supérieure, à une girouette en forme d’arbre permettant de mesurer l’impact du vent sur les arbres vrais.
Fruit d’une relation très étudiée entre son contexte naturel autant que culturel. Dendroscopes et colonnes invite, en connivence avec l’Observatoire proche, à un autre regard sur la nature environnante. Il illustre la pertinence de la démarche de certains sculpteurs d’aujourd’hui, et singulièrement celle de Daniel Dutrieux, qui, relativisant le rôle des objets sculpturaux, rappelle que “la distance entre ceux-ci, et les liens qu’ils suscitent avec l’environnement ont une importance parfois plus grande que les objets eux-mêmes (… qui) ne sont que les traits d’union d’un ensemble spatial à découvrir” …
Yves Randaxhe